Episode 2.08 - Better Call Saul

Réalisation : Michelle MacLaren
Scénario : Sam Catlin
Première diffusion US : 26 avril 2009 (AMC)

L'un des dealers de Jesse et Walter, Badger, se fait arrêter par un agent des stups, et prend pour le représenter Saul Goodman, un avocat star de la télé dont l'intégrité n'est pas la première qualité. Obligé d'en régler les émoluments, Walter se rend à son officine et tente finalement de l'acheter, et avec lui le silence de Badger. Contre toute attente, Saul refuse. S'ensuit une suite de péripéties qui, si elles sauvent temporairement la mise de Badger et Walt, les conduiront à s'encombrer de l'avocat véreux pour un bon moment.

Votre avis sur l'épisode ?

L'épisode est, comme à l'accoutumée, très plaisant à suivre mais on n'en gardera pas un souvenir inoubliable. Globalement, à part le traumatisme de Hank, il est plutôt léger, avec cette histoire d'avocat corrompu jusqu'au cou mais tout aussi déjanté, qui sort des séries comme Pushing Daisies.

C'est avec une relative facilité que le duo sort de cette galère qui, au fond, n'a pas servi à grand chose, si ce n'est éloigner la menace de la DEA pour Walter... pour encore combien de temps ?

Je suis sans doute trop en mode fanboy, mais comme d'habitude, j'ai trouvé plein de choses intéressantes dans cet épisode. Certes, comme tu le soulignes, l'épisode ne restera peut-être pas dans les mémoires en tant que tel, mais plein de choses se mettent en place.

Il y a déjà l'introduction de cet avocat, Saul, qui est effectivement au premier abord déjanté et burlesque, mais a un potentiel foutagedemerdesque relativement colossal, un personnage sombre, énigmatique, dont on ne sait jusqu'où il est prêt à aller, ni quand il retournera sa veste par opportunisme, envie, ou rétribution. Parce qu'il a quand même été agenouillé devant sa tombe, un flingue pointé sur la nuque, qu'il a l'air d'avoir un carnet d'adresses dont les connexions s'étendre bien dans la pègre, et qu'il a surtout un gros dossier sur les deux : sur ce qu'il a trouvé de lui-même grâce au détective qu'il a engagé (et il n'a sans doute pas tout dit), et de ce que Walter lui a lui-même révélé lorsqu'il a tenté de le corrompre (j'ai d'ailleurs à ce moment été surpris de la candeur de Walter et me suis dit qu'il commettait sa première grosse erreur). Un personnage peut-être un peu too much et moins réaliste que les autres, mais qui vient combler le vide laissé par Krazy-8, Tuco, etc., qui d'ailleurs n'étaient pas moins tarés et instables (volatils, dirait Walter).

Les séquences avec Hank m'ont également marqué. Il y a d'abord cette inversion des rôles formidable en début d'épisode où Walter, charismatique comme pas possible, vient rendre visite à un Hank prostré dans son lit et lui fait la morale en lui expliquant en gros (ce qui constitue quand même un sacré contrepied par rapport au début de la série) qu'il doit se comporter comme un homme, et comment y parvenir. Il y a eu, entretemps, la découverte par Walter du monde de Hank, qui y a plongé bien plus avant. La séquence m'a d'ailleurs évoqué une citation de Céline au début du Voyage, lorsque le narrateur découvre la guerre : "On est puceau de l'Horreur comme on l'est de la volupté" (le paragraphe complet, à lire comme le reste du bouquin est là). Walt a découvert l'Horreur, est un Homme, et peut en parler à Hank.

Et puis cet autre passage final, avec Hank. Concernant l'histoire en elle-même, le duo semble en effet s'en sortir assez "facilement" (disons que c'est réglé en un épisode), mais la séquence de fin avec l'échange est quand même énorme en termes de pression, et de millimétrage, la montée d'adrénaline est, comme souvent dans la série, jubilatoire. Et, donc, concernant Hank, ce regard final dans le vague, pensif, où on l'imagine resonger aux actes et paroles de Walter dans la journée, et surtout de la coïncidence troublante de sa présence à cet instant précis en ce lieu précis. J'adore ce que cette série sait dire en juste un regard.

Bref, ravi de l'épisode et impatient de voir la suite... Comme d'hab, quoi.

L'épisode suivant est fabuleux, le meilleur de la saison jusqu'à présent à mon sens.

J'aime beaucoup ton analyse et je me rends compte d'être passé à beaucoup d'éléments, faute de culture. À vrai dire, l'épisode n'est plus très frais dans ma tête et je n'ai plus que quelques bribes de souvenirs...

Là où je te rejoins parfaitement, c'est que Breaking Bad n'a pas besoin de dialogues pour faire parler ses personnages, là où certaines séries s'en sentent obligées (Desperate Housewives excelle dans l'art de ne rien dire par exemple). C'est en cela que Walter parait si froid quand il met ses lunettes teintées ; quand il les enlève, il parait déjà beaucoup plus emphatique et suscite une certaine pitié.

Enfin, même si c'est bien plus visible dans l'épisode suivant, le duo Walter-Jesse fonctionne à merveille, c'est incroyable comment tant de différences entre les deux peut créer une telle alchimie.

Vous avez bien résumé, je n'ai plus rien à dire. Je suis d'accord sur pleins de choses.
Sans le moindre dialogues, on comprend beaucoup de choses.

le petit maigrelet qui est en fait un flic !
comment il a fait sérieux ?
on dirait qu'il a 15 ans

sinon un truc qui me dérange : l'avocat le plus véreux des USA se trouve comme "de par hasard" dans le blaide paumé de Walter et Jesse... moué

j'ai l'impression que Walter et Heinsenberg sont de plus en plus "séparés", 2 personnes complètement différentes
rien que quand il met ses lunettes et son chapeau

Citation :

l'avocat le plus véreux des USA

Regarde The Wire et dis-nous ce que tu penses de Maître Levy... J'imagine qu'il y a au moins un avocat comme ça partout là où il y a de la drogue...

La première scène de l'épisode m'a flanqué un gourdin pas possible, ce long plan fixe (presque 5 minutes) sur deux types qui discutent sur un banc, dans un dialogue digne de Tarantino (accessoirement, faut des putains d'acteurs de théâtre pour faire ça). Et la conclusion hilarante, avec les deux camionnettes qui rappliquent ("Duke City Flowers", excellent). Hilarante, mais pleine de tension aussi, parce que bon, un des revendeurs qui se fait choper, c'est tendu du slip, quand même.

La suite m'a un peu plus déçu, je dois bien l'avouer, je n'étais pas vraiment convaincu par le personnage de l'avocat non plus (malgré ses pubs à se rouler par terre). Pas super convaincu non plus par les péripéties, la mini intrigue "comment faire sortir Badger sans qu'il parle" etc.
L'épisode est toutefois, selon moi, totalement sauvé par sa fin. D'abord le suspense génial autour des "deux bancs". La parade trouvée par Walt est fantastique, on voit que dorénavant il arrive à complètement séparer Walt et Heisenberg, on ne sait même plus qui est le "vrai" Walt : quand il arrête sa voiture à hauteur de Hank et qu'il rentre dans son rôle de Walt version "père de famille tranquille", il fait juste un fantastique numéro d'acteur, absolument convaincant dans son rôle du gars gentil, limite con-con, un peu boulet ("Working ? Oh, you mean D.E.A. working ? Something's going on ?" ), bref du grand Walt, ou du grand Heisenberg, on ne sait plus trop.
Belle conclusion de la scène, aussi, avec le type qui se met genoux à terre, mains derrière la tête avant même qu'on entende la moindre sirène. Et au moment même ou le spectateur pense "ils s'en tirent un peu facilement, quand même", le regard de Hank, qui a l'air de penser exactement la même chose : "c'était un peu trop facile". Excellent. Cette histoire n'est pas finie.

Et j'ai beaucoup aimé la dernière scène, où l'avocat devient enfin intéressant et crédible, et qui relance bien l'intrigue. Walt prend conscience qu'il pourrait réellement avoir besoin d'un avocat véreux, et donc qu'il devient un vrai criminel. J'ai adoré la référence à Tom Hagen, qui a toujours été mon personnage préféré de la saga Le Parrain. Le fait que cette rencontre ait lieu dans le contexte de la salle de classe est particulièrement réjouissant aussi, Walt se sent vulnérable ici, mis à nu, c'est bien joué de la part de l'avocat. Sans parler de quelques répliques bien senties : "My P.I charged me for 3 hours, so I seriously doubt it took him more than one."